Au temps de la prise de Constantinople par les Ottomans,
les théologiens dissertaient sur le sexe des anges,
aujourd’hui, alors que l’islam révèle chaque jour davantage sa nature d’Antichrist,
l’Eglise disserte du “mariage” des homosexuels…
A l’occasion des États Généraux du Christianisme qui se sont tenus à Strasbourg du 2 au 4 octobre 2015, intitulés Enjeux et espoirs du Synode sur la famille, un débat a eu lieu entre Mgr Jean-Paul Vesco, évêque d’Oran, et Mgr Marc Aillet, évêque de Bayonne sur le thème : « L’Église doit-elle changer ? ». Le débat était animé par Jérôme Anciberro, rédacteur en chef à La Vie et Philippine de Saint-Pierre, directrice générale de KTO, et il est visible sur la chaîne Youtube de KTO à cette adresse.
Ordinairement, les acteurs d’un débat sont choisis en fonction de leurs positions antagonistes, sinon, il n’y a pas débat. C’est ainsi que Mgr Vesco a certainement été choisi en raison de son appel à libéraliser la discipline de l’Église jusqu’à l’admission les adultères publics à la réception des sacrements, et à la reconnaissance ecclésiale de l’union des paires homosexuelles, tandis que Mgr Aillet est considéré comme incarnant l’aile conservatrice de l’épiscopat français.
A défaut du combat attendu, ce débat a montré l’accord des deux protagonistes pour donner la communion aux adultères publics…
C’est ainsi que Mgr Aillet, après avoir donné de très belles méditations bibliques sur la réalité de l’amour conjugal et opportunément rappelé que le mariage n’est pas une construction culturelle mais une institution divine (13’10), nous a malheureusement appris qu’aux adultères publics, il disait : « Je n’ai pas le droit de vous dire de ne pas communier. » (32’47), et d’ajouter : « Je ne refuserai jamais la communion à quelqu’un même si je sais qu’il est une personne divorcée remariée. » (35’02). Ce faisant, il foule aux pieds ce que lui demande l’Église (Cf. Déclaration du Conseil Pontifical pour les textes législatifs, 24.06.2000)… Au lieu d’élever la vie des hommes, des pasteurs de l’Église préfèrent donc abaisser la discipline du Christ au niveau du « vécu des gens », la sainteté au niveau du péché, donner ce qui est sacré aux chiens. Et si quelqu’un se scandalise de ce que j’emploie cette dernière expression, qu’il veuille bien considérer qu’elle n’est pas de moi, mais du Christ (Mt 7.6), et que si Jésus a interdit de donner ce qui est sacré aux chiens, Il ne songeait certainement pas aux chiens, mais aux pécheurs, à qui Il ne veut pas que l’on donne ce qu’il y a de sacré, et a fortiori ce qu’il y a de plus sacré ici-bas, à savoir Son propre corps (Col 2.17), c’est à dire Lui-même, « Tout le trésor spirituel de l’Église » (CEC 1324).
Si je prends la peine de souligner ce rejet ordinaire de la discipline de l’Église par Mgr Aillet, ce n’est pas tant pour exprimer l’étonnement et la peine qu’il a provoqué en moi, que par obéissance à ce l’Église demande à chacun de ses enfants « de prêter une attention particulière à ce que le très saint Sacrement de l’Eucharistie soit défendu contre tout manque de respect et toute déformation, et que tous les abus soient complètement corrigés. Ce devoir, de la plus grande importance, qui est confié à tous et à chacun des membres de l’Église, doit être accompli en excluant toute acception de personnes. » (Redemptionis Sacramentum, n°183), mais aussi pour dénoncer cette désobéissance généralisée au sein du clergé, désobéissance qui y est même enseignée comme un devoir, tandis que l’obéissance y est sanctionnée…
Je profite cependant de l’occasion pour relever encore quelques autres perles dans ce débat. Pour Mgr Vesco, ce n’est pas le péché qui fait souffrir les gens, mais l’Église ! Elle « a énormément fait souffrir » (24’25) par sa discipline sur le mariage, qui est aujourd’hui inadaptée aux nouvelles formes de famille (54’12), une évolution sur laquelle il n’est pas question de revenir (6’15), que l’Église se doit donc d’entériner, car, c’est bien connu, sa mission n’est pas de sauver les âmes (28’48), mais d’avaliser leurs errements (16’40). Bravo pour ce témignage d’espérance et de combativité invitant à nager à contre-courant ! Jamais au cours de ce débat il n’a été question de « péché »… « La discipline de l’Église » ― et donc indirectement à l’Église ― ayant « provoqué une hémorragie dans l’Église » (24’50), il faudrait changer la discipline de l’Église, mais aussi certainement sa doctrine, car d’où vient la discipline sinon de la doctrine ? Et à changer de doctrine, changer l’Église elle-même. Jésus a-t-Il modifié son discours lorsque ses disciples ont trouvé ses paroles trop dures (Jn 6.60) ?
Lorsque Mgr Vesco se réjouit de ce que Mgr Aillet donne la communion aux “divorcés remariés”, il imagine que Mgr Aillet puisse même leur donner le sacrement de réconciliation… autrement dit, il imagine qu’il soit possible de communier sans avoir d’abord reçu le sacrement de pénitence (33’38) ! Et en s’étonnant de ce que le sacrement du pardon ne puisse pas être donné à cause de l’adultère, parce que les adultères publics pourraient recevoir ce sacrement au moins pour leurs autres péchés (33’50), il donne de Dieu l’image d’un comptable, qui juge non en fonction de l’être, mais de l’avoir… Or, pour Jésus, il en va différemment. Jésus ne dit pas que l’on peut être à 10, 15, 30 ou 92 % pour Lui, mais que l’on est pour Lui ou contre Lui (Mt 12.30). Avec Dieu, c’est tout ou rien. Les tièdes, Il les vomit de Sa bouche (Ap 3.16).
Aussi étonnant que cela puisse paraître, et personne ne l’a relevé, Mgr Vesco ne semble pas voir la contradiction qu’il y a pour lui à demander à ce que soit reconnue définitive l’union des adultères publics (30’40), alors même que cela supposerait de nier l’indissolubilité du « premier » mariage… Pourquoi et comment reconnaître un caractère « définitif » à une union – qui plus est, adultère ! – si pour ce faire il faut nier ce même caractère au précédent mariage réputé pourtant indissoluble (40’20) ? Pourquoi le deuxième mariage devrait-il être reconnu définitif et pas le premier ? Comment Mgr Vesco peut-il trouver que “dire à des divorcés-remariés de se séparer est contraire à la doctrine catholique du mariage et de l’indissolubilité” (31’58) et Mgr Aillet affirmer que “L’Eglise ne dit pas aux divorcés-remariés d’arrêter leur relation.” (32’12), alors que le contraire a été toujours été enseigné par l’Eglise, ainsi que saint Jean-Paul II, dans cette admirable encyclique qui eût dispensé de ce synode si elle avait été accueillie comme elle aurait dû l’être, le rappelle : “L’Eglise, cependant, réaffirme sa discipline, fondée sur l’Ecriture Sainte, selon laquelle elle ne peut admettre à la communion eucharistique les divorcés remariés. […] Cela implique concrètement que, lorsque l’homme et la femme ne peuvent pas, pour de graves motifs – par l’exemple l’éducation des enfants -, remplir l’obligation de la séparation, « ils prennent l’engagement de vivre en complète continence, c’est-à-dire en s’abstenant des actes réservés aux époux »“ (n°84) L’o-bli-ga-tion-de-la-sé-pa-ra-tion... fon-dée sur l’E-cri-tu-re-Sain-te… Comment est-il possible de demander à qui renie l’enseignement constant de l’Eglise – que le jour de son ordination il a pourtant juré de garder fidèlement -, de prendre la parole en son sein ?
Mgr Vesco rejette la demande faite par l’Église aux « divorcés-remariés » ne pouvant se séparer ― en raison de l’éducation de leurs enfants―, de vivre en frère et sœur, et de pouvoir à cette condition accéder aux sacrements (37’20), au motif que, selon saint Thomas d’Aquin, ce n’est pas la relation sexuelle qui fonde le mariage, mais « l’amour que se donnent les époux » (38’30), et de donner comme justification la validité du mariage de Marie et Joseph… Or, ce que Mgr Vesco omet de dire, est que si la forme du mariage est bien l’union indissoluble des esprits selon saint Thomas d’Aquin, cette union est cependant ordonnée à une fin, qui est l’enfant (CEC n°1641). Et Jésus était l’enfant auquel était ordonné le mariage de Joseph et Marie. Bien plus : ils eussent consenti à avoir des relations sexuelles si telle avait été la volonté de Dieu (III, Art. 2, Q. 29), ce que Dieu interdit expressément aux gens non-mariés, même de désirer (Mt 5.28). Voilà pourquoi la comparaison que Mgr Vesco établit entre les couples vivant en frère et sœur et le couple de Joseph et Marie ne vaut pas. Répétons-le : aussi vrai qu’il n’existe pas de forme sans fin, il n’existe pas de mariage sans désir de procréation. Il n’est donc pas possible de dire que toute amitié entre un homme et une femme est de type conjugal. Mais si pour Mgr Vesco ce qui fonde le mariage est seulement l’amour (38’02), et que sa fin n’est pas la procréation, alors nous restons pantois à la considération du type de relations qu’il peut entretenir, pantois devant le nombre de polygames que contient alors le monde, et révolté devant l’outrage infligé à tous ceux qui prétendent s’aimer en frère et sœur ― et l’on pense à tant de Saints.
Pour rejeter l’interdiction du divorce donnée par Jésus en Mt 19.6, Mgr Vesco prétend que Jésus condamnerait seulement la répudiation, mais il se garde bien de nous dire quelle différence substantielle il voit entre le divorce et la répudiation (44’50)… A ce sujet, notons comment il est ridicule d’imaginer Jésus Se contredire en disant qu’il y aurait une exception à l’interdiction absolue qu’Il formule du divorce : “Ce que Dieu a uni, que l’homme ne le sépare pas” (Mt 19.6) ! Le fait que les deux autres évangélistes ne mentionnent pas l’exception de “porneia” porte à croire que la clause restrictive n’est pas de Lui, mais de l’un des derniers rédacteurs du premier évangile, soucieux de répondre à une problématique de la communauté judéo-chrétienne pour laquelle il écrivait, et régler la question des convertis du paganisme engagés dans des relations incestueuses à des degrés défendus par la Loi (Lv 18). De même que le principe selon lequel tous les aliments sont bons (Mc 7.19) ne souffrait pas d’exception lorsque les chrétiens s’abstenirent pourtant de manger “des viandes étouffées et du sang” (Ac 15.28-29), interdiction qu’ils s’imposaient par diplomatie ou charité (1 Co 10.29), de même, la possibilité de rompre des unions qui n’en sont pas n’invalide pas l’interdiction absolue du divorce.
Au sujet d’une préparation au mariage plus exigeante présentée comme moyen d’éviter les problèmes que rencontrent certains couples mariés, Mgr Vesco fait remarquer que cela conduirait à devoir refuser à certains candidats de célébrer leurs noces. Or, dit-il, ce serait là « un contre-témoignage » (53’30). Mais si la préparation sert à faire la vérité (Jn 3.21), à quoi un refus peut-il rendre un contre-témoignage sinon à cette pseudo charité ne faisant pas de différence entre la vérité et le mensonge ? On comprend alors que cette pseudo miséricorde n’ait pas besoin de la conversion pour donner le pardon (42’20 ; 54’50), mais s’inquiète de voir reconnues les « familles homoparentales » (J’aimerais bien que l’on me dise comment des familles “homoparentales” peuvent naturellement procréer, et pour cela avoir besoin de fonder un foyer ! A moins que Mgr Vesco ait voulu dire “monoparentales” ? Un magnifique lapsus ?), les « familles issues de couples homosexuels » (54’50)… en attendant quoi d’autre ?
Il est vrai que depuis le concile Vatican II il n’est question que d’annoncer la vérité sans plus dénoncer l’erreur, et ce alors même que les deux attitudes sont nécessairement inséparables, témoins l’une de l’autre. La preuve de l’amour de la vérité n’est-elle pas la haine du mensonge ? Cette nouvelle culture de la tolérance mise son efficacité sur la puissance de l’esprit de séduction, aussi est-il si étonnant qu’elle s’inquiète d’homosexualité au sein du présent synode consacré au mariage et à la famille ? Comment des hommes privés de l’exercice de leur appétit irascible, dévirilisés, seraient-ils capables de ne pas rechercher la considération d’autrui, mais de dévoiler son péché, « à temps et à contretemps, avec une autorité entière » (2 Tm 4.2) ? Cette dénonciation est parfois pourtant le seul témoignage possible qui puisse être rendu à la vérité, et à défaut duquel le silence est complicité… Si un pasteur ne se reconnaît pas “le droit de dire à quelqu’un qu’il doit faire comme je lui dis” (32’33), comment peut-il être alors guide du troupeau ?
Ce synode qui a mon avis n’aurait jamais dû avoir lieu, ou alors afin de dénoncer au grand jour les vrais ennemis de la famille et prendre les mesures adaptées pour les combattre, voit l’opposition fallacieuse que promeuvent certains loups déguisés en agneaux entre, d’une part, la doctrine de l’Église présentée comme le fardeau d’une loi extrinsèque à la vie des gens, et d’autre part la pastorale considérée comme l’expression de la miséricorde du Christ venant réconcilier les pécheurs avec Dieu. Comme si la pastorale n’était justement pas l’introduction de la doctrine salvatrice du Christ dans la vie des gens, moyennant leur conversion (Mt 3.2 ; 4.17) ! Sans la doctrine, y aurait-il une pastorale ? Au temps de la chute de Constantinople, les théologiens dissertaient sur le sexe des anges, aujourd’hui, alors que l’islam révèle chaque jour davantage sa nature d’Antichrist, l’Eglise disserte du “mariage” des homosexuels… Bref, « Une Église qui a renoncé à convertir, et n’est plus signe de rien, a quelque chose à dire. » (49’08)…
Abbé Guy Pagès
Le genre de famille que Mgr Vesco veut voir reconnu par l’Eglise…
Excellentes analyses du synode par Aline Lizotte, Jeanne Smith et Roberto di Mattei
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