Entretien avec Dominique Tassot, le 1er mai 2022 sur Radio Courtoisie.

1. Pourquoi l’islam devrait-il évoluer ?
2. Est-il possible que l’islam évolue ?
3. Y a-t-il déjà eu des tentatives de faire évoluer l’islam ?
4. Qu’est-ce que le salafisme ?

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I. POURQUOI FAUDRAIT-IL QUE L’ISLAM ÉVOLUE ?

Pour la même raison qui fait que tout le monde aujourd’hui, de Dakar à Jakarta, de Stockholm à Tombouctou, souhaite un islam modéré ! La réponse à la question : Pourquoi faudrait-il que l’islam évolue ? est donc simple : pour que cesse la haine des non-musulmans, la légitimation de l’esclavage, le meurtre des apostats, l’avilissement des femmes, depuis la répudiation, la polygamie, jusqu’au mariage des fillettes, etc. etc. Souhaiter que l’islam évolue, c’est donc souhaiter la fin des barbaries faites en son nom.
« Ô Prophète ! Fais la guerre aux infidèles et aux hypocrites, sois dur avec eux ! L’enfer sera leur demeure ! (Coran 66.9) » ; « Combattez-les à mort jusqu’à ce qu’il n’y ait plus d’Église et que la religion soit seulement l’islam ! (Coran 2.193) » ; « Ce n’est pas vous qui les avez tués, c’est Allah. Lorsque tu frappais, ce n’était pas toi, c’était Allah. (Coran 8.17) » ; « La rétribution de ceux qui refusent d’être islamisés ou qui s’opposent à l’ordre islamique, c’est qu’ils soient tués, ou crucifiés, ou que leur soient coupés la main et le pied opposés, qu’ils soient expulsés de la terre. (Coran 5.33) » ; « Que les mécréants ne pensent pas pouvoir nous échapper. Non ! Nous les rejoindrons où qu’ils soient ! Ô Prophète, incite les croyants au combat ! (Coran 8.59,65) » Ce qui se traduit sous la plume du chef d’État de Bosnie-Herzégovine de 1990 à 2000, Alija Izetbegovic : « Il ne peut y avoir ni paix ni coexistence entre la religion islamique et des institutions politiques et sociales non-islamiques. […] La renaissance islamique ne peut commencer sans une révolution religieuse, mais elle ne peut se poursuivre et être menée à bien sans révolution politique. Notre première tâche doit être de gagner non le pouvoir mais les hommes. […] Le soutien qu’un peuple musulman apporte effectivement à un régime en place est directement proportionnel au caractère islamique de ce dernier. […] Nous devons être des prêcheurs et ensuite des soldats. […] Le mouvement islamique doit prendre le pouvoir dès qu’il est en situation morale et numérique suffisante pour lui permettre de renverser le gouvernement non-islamique. (Déclaration islamique, 1970) » Considéré comme relevant seulement de la sphère privée, l’islam se voit honoré par une civilisation qu’il se doit de détruire… En voulant ne voir dans l’islam qu’une religion, et non une tyrannie politico-religieuse, les apostats du christianisme ont ouvert toutes grandes les portes de notre pays à la guerre de conquête que prescrit Allah.
Surgit ici un énorme piège : la notion d’islam modéré, qui laisse croire à l’existence d’un islam acceptable, objet de l’évolution souhaitée, et source d’investissements aussi onéreux que stériles. En effet, « l’expression “islam modéré” comme dit le Président turc, M. Erdogan, « est laide et offensante, car il n’y a pas d’islam modéré. L’islam est l’islam ! (Kanal D TV, Août 2007) » Cette notion d’islam modéré est un cheval de Troie inventé par les Frères musulmans pour faire accepter l’islam à l’Occident. Mais l’Occident apostat ne veut pas le savoir, trop heureux de professer le dogme maçonnique de l’égalité des religions pour renier ainsi la religion catholique comme étant la seule vraie religion. En vérité, il n’y a pas de différence fondamentale entre musulmans modérés et islamistes puisque les uns comme les autres se réfèrent au même Allah, au même Mahomet, au même Coran. Ou on est musulman ou on ne l’est pas. Qu’est-ce qu’un musulman modéré ? C’est quelqu’un qui est modérément musulman. Un musulman modéré, est-il modéré parce que les abominations islamiques sont modérément acceptables, ou parce qu’il est modérément humain ? Dit-on d’une femme qu’elle est modérément enceinte ? Ou elle l’est, ou elle ne l’est pas. Celui qui est qualifié de modéré est ordinairement un homme préférant obéir à sa conscience plutôt qu’à Allah. Un bon musulman est donc un mauvais musulman, aussi les islamistes le tuent comme les mécréants, puisque, comme eux, il n’obéit pas au Coran (Coran 3.166-167 ; 4.137-139,142,145 ; 9.66-68,73). L’appellation islam modéré suffit à dénoncer l’islam comme mauvais, car si l’islam doit être modéré pour être acceptable, c’est donc qu’en soi il ne l’est pas ! Nul besoin de modérer le christianisme ! Il n’y a donc pas à attendre un islam modéré, aussi vrai que partout où il est prêché, encouragé, il développe les abominations dénoncées. Comme dit Jésus : « Un arbre mauvais ne peut donner de bons fruits. (Mt 7.18) » Mais si même les mécréants défendent l’islam, comment un musulman le condamnera-t-il (Coran 3.103 ; 49.10-11) ?

II. EST-IL POSSIBLE QUE L’ISLAM ÉVOLUE ?

Si l’on s’en tient au principe même de l’islam, ce n’est pas possible puisque pour lui la perfection est dans le passé, incarnée dans Mahomet … Il n’y a donc pas lieu d’évoluer, mais au contraire d’involuer. A contrario, la civilisation occidentale a été informée par la vision linéaire et eschatologique du temps, tendue vers le retour en gloire de Jésus venant juger les vivants et les morts et les établir dans leur éternité, terme de l’histoire. La civilisation occidentale, comme l’a si bien montré Benoît XVI dans son admirable discours aux Bernardins en 2008, a eu foi dans un avenir riche de promesses, dans un progrès du temps. Pour elle, le progrès était possible et souhaité puisque le Christ a annoncé que des œuvres même plus belles que les Siennes pourraient être faites (Jn 14.12) ! On est loin de la répétition du même revendiqué par l’islam, copie de la vie de Mahomet, passé mythique servant d’idéal au présent, de règle pour une restauration continuelle, un retour aux origines. « Le meilleur discours est le livre d’Allah et la meilleure direction est celle de Mahomet. Les pires des choses sont les innovations, et toute innovation est une aberration. (Mouslim, n°867) » Inutile donc de condamner l’esclavage aux oreilles d’un vrai musulman puisque vivant au temps de Mahomet, il voit celui-ci le pratiquer ! L’histoire est pour lui involutive, le progrès y est, par principe, impossible et mauvais (6.153 ; 7.3). Les langues sémitiques anciennes ne connaissaient d’ailleurs pas notre distinction du temps en passé, présent et futur, mais seulement l’action accomplie, parfaite, et l’action inaccomplie, imparfaite. « Chaque chose nouvelle est innovation, et chaque innovation est égarement et chaque égarement conduit en enfer ! (Nasaï, Sounan, n°1578) » Prétendre innover relève donc du sacrilège. Le mot arabe bid‘ah signifie d’ailleurs innovation et hérésie. En voulant ramener l’homme à l’état de pure nature, au point zéro de son histoire, l’islam détruit ce qui rend une vie humaine, car qu’y avait-il au point zéro de l’Histoire … sinon rien ?

On peut encore considérer que la croyance au Coran incréé (Coran 13.39 ; 43.4 ; 56.78) permet, certes, aux musulmans de mettre l’islam à l’abri de toute comparaison, et donc de toute contestation, mais en situant le musulman avant le temps, hors du temps, elle le chasse aussi hors de l’Histoire… où il n’est donc pas question d’évolution.

Il importe de toujours garder en mémoire le fait que le bien que l’on peut trouver en islam — comme le fait de vouloir adorer le Créateur, Le remercier, se soumettre à Sa volonté, etc., relève non de l’islam en tant que tel, mais de la nature humaine, créée capable de connaître ces vérités d’ordre naturel, raison pour laquelle, par exemple, saint Paul jugeait inexcusable la non-reconnaissance de l’existence de Dieu (Rm 1.18-21). L’islam utilise donc des vérités d’ordre naturel, telle que l’existence de Dieu et son unicité, pour faire croire que le reste de son discours est aussi vrai, à savoir, notamment, ses calomnies au sujet de la foi chrétienne (Coran 4.171). Le bien que l’islam présente n’est donc qu’un leurre pour tromper les âmes : de même qu’il détourne la gloire de l’unique et vrai Dieu pour l’attribuer à Allah et justifier ainsi au nom de Dieu les abominations islamiques, de même, il détourne les musulmans vers des pratiques comme la prière, le jeûne, la pudeur, etc., pour les enfermer dans les apparences d’une vie religieuse et les tenir ainsi éloignées de leur salut donné seulement dans l’Église (Cf. Col 2.16-23). Ce qui est souhaitable, ce n’est donc pas que l’islam évolue, mais qu’il disparaisse, car il est littéralement et réellement un antichrist au sens défini par saint Jean (1 Jn 2.22). C’est-à-dire qu’il conduit en Enfer, aussi vrai que seul Jésus est le Messie, le Sauveur. Ce qui pointe vers la responsabilité de l’Église et son ardeur missionnaire aujourd’hui stérilisée par le relativisme doctrinal … Pour saint Pie X : « Les difficultés viennent de qui les crée et les exagère, de qui se confie en lui-même et non sur les secours du Ciel, de qui cède, lâchement intimidé par les railleries et les dérisions du monde. » …

Autres difficultés :

• Comment le musulman, convaincu que le pire péché est l’associationisme, peut-il s’en remettre au jugement d’autrui (Coran 4.48 ; 9.31) ?
• Allah lui fait mépriser et condamner tout ce qui n’est pas musulman (Coran 2.170,193), donc pas de solution venant d’ailleurs que de ce qui est déjà. De plus, le Coran était et est toujours censé répondre à toute interrogation, puisqu’Allah a affirmé qu’il est « l’exposé détaillé de toute chose (Coran 7.145 ; 12.111 ; 16.89) », où « tout est consigné (Coran 22.70 ; 50.4 ; 78.29) » … On ne peut donc logiquement croire Allah et aller chercher ailleurs que dans le Coran ce qu’il y a besoin de savoir. Là se trouve la raison de l’immobilisme et du retard musulman en tous les domaines (sauf en celui de la haine puisqu’Allah se charge de la mettre lui-même au cœur des musulmans (Coran 5.64))
• Le musulman vit avec le mythe de la grandeur passée de la civilisation islamique, donc, pas de raison de vouloir autre chose que son retour.
• Le rôle des modérés annihile la critique de l’islam.
• La propagande laïque valorisant l’islam. Cf. Les dernières Recommandations du Conseil de l’Europe contre le “racisme antimusulman”: Les racines musulmanes de la France et de l’Europe.

III. Y A-T-IL DEJA EU DES TENTATIVES DE FAIRE ÉVOLUER L’ISLAM ?

A) La question de l’évolution de l’islam a déjà trouvé une réponse en l’an 847 lorsque le calife abbasside Al-Mutawakkil a interdit de poursuivre la réflexion sur les applications du Coran (Ijtihad). En effet, les disputes et les absurdités auxquelles cette réflexion donnait lieu devinrent si dangereuses pour l’unité de la société que le calife stoppa net la réflexion, imposa la croyance au Coran incréé, et rejeta le mutazilisme (école de pensée reconnaissant le libre arbitre, la raison, l’usage de la logique et des concepts de la philosophie grecque, et l’origine humaine du Coran). Depuis lors, la théologie musulmane n’est qu’une apologie défensive, le kalam, la répétition immuable de contestations devenues sans objet. A contrario, parce que Jésus nous ouvre à la révélation complète de la Vérité (Jn 15.15 ;16.13) les chrétiens furent les premiers, et sont souvent encore les seuls, à étudier l’islam d’un point de vue scientifique. Certains contestent la clôture de l’ijtihâd en faisant valoir que de nouvelles situations amènent de nouveaux problèmes juridiques, et que donc la réflexion doit se poursuivre. Mais cette position ébranle les fondements la maison islam, puisqu’elle nie non seulement que le Coran soit « l’exposé détaillé de toute chose (Coran 7.145 ; 12.111 ; 16.89) », où « tout est consigné (Coran 22.70 ; 50.4 ; 78.29) », mais que cela soit exprimé de façon « explicite (Coran 5.15 ; 12.1 ; 15.1 ; 44.2) », « évidente (Coran 4.174 ; 6.57) », « claire (Coran 36.69) », « sans ambiguïté (Coran 18.1) » … Dès lors, comment un droit moderne ne remettrait-il pas en cause la perfection de la révélation coranique ? L’homme a-t-il le droit d’intervenir dans l’élaboration de règles et de jugements réglementant la vie des gens, domaine réservé à Dieu seul ? Et comment les musulmans s’ouvriraient-ils à l’inconnu que suppose toute évolution, puisqu’Allah interdit la réflexion : « Ne posez pas de question sur des choses qui, si on vous les expliquait, pourraient vous porter malheur ! (Coran 5.101) » Puisqu’Allah établit que l’on peut épouser les fillettes non encore pubères (Coran 4.127 ; 65.4), ou de ne pouvoir reprendre son épouse répudiée qu’à la condition qu’elle se soit d’abord donnée à un autre homme (Coran 2.230), quel bon musulman, quel vrai croyant osera contester le droit d’Allah ?

B) Si la dhimma et l’esclavage ont été officiellement abolis par la colonisation, la différence de traitement, les injustices et humiliations pour les non-musulmans sont toujours d’actualité dans les pays musulmans (Cf. Magdi Sami Zaki, Histoire des coptes d’Égypte, Éditions de Paris, 2005, p.479-577). Par exemple, un non-musulman ne peut toujours pas hériter de son conjoint musulman (Boukhari 1588 ; 4283), et si un chrétien se convertit à l’islam, ses enfants sont considérés comme musulmans même s’ils sont majeurs et veulent rester chrétiens. La législation coranique stipule que la fille n’hérite que de la moitié de ce que son frère reçoit (Coran 4.11). Mais voilà qu’Abdelwahab Rafiki, alias Abou Hafs, ancien détenu salafiste, appelle aujourd’hui à un débat sur l’égalité en matière d’héritage car, dit-il, « les sociétés qui n’innovent pas en proposant des solutions ne peuvent pas évoluer. » Il est intéressant de savoir que cet homme, né en 1974 à Casablanca, a été l’objet d’un embrigadement tel qu’en 1990, encore mineur, il suivit son père en Afghanistan. Arrêté en 2003 après les attentats de Casablanca qui ont fait 45 morts, il a été condamné à 30 ans de prison, mais a été libéré sur grâce royale en 2012. Aujourd’hui, ses idées sur les débats de société sont aux antipodes de celles que, salafiste, il a prêchées. Il veut aujourd’hui libérer la religion du joug de la politique et vice versa, tout en encourageant la liberté de conscience, qu’il considère comme un droit humain fondamental. Comme quoi la prison a du bon ! En 2017 il a appelé à débattre des règles successorales islamiques dans un livre collectif avec une centaine d’écrivains, journalistes et artistes, ce qui lui a valu d’être anathématisé par un collectif d’oulémas maghrébins et de recevoir des menaces de mort. Le Pape Pie II ne se trompait pas lorsqu’il écrivait que « L’islam ne s’appuie pas sur la force des arguments, mais sur celle du glaive, comme s’il ne pouvait compter sur la discussion pour s’imposer et redoutait d’être mis à nu. (Lettre à Mehmet II, Payot & Rivages, 2002, p.36) » Il faut dire que le Coran, censé être la Parole immuable et parfaite de Dieu, dans ses versets 11, 12 et 176 de la sourate 4 répartissent ainsi l’héritage : l’époux et la sœur d’une défunte reçoivent chacun la moitié du legs, tandis que la mère en reçoit le tiers … Si la défunte laisse deux sœurs, alors chacune d’elles en reçoit le tiers, ainsi que la mère, et l’époux la moitié … Souvent, dans le Coran, la somme des parts dépasse le total … Si Allah ne sait pas compter, est-il Dieu ?

C) Une récente et retentissante tentative de faire évoluer l’islam a été celle du président égyptien Abdel Fattah Al-Sissi, qui, le 1er janvier 2015, a prononcé un discours capital devant les dignitaires de l’importante université al-Azhar du Caire. Il a appelé à rien de moins qu’à une « révolution religieuse », et ce en raison de la violence intrinsèque à la pensée islamique aujourd’hui dominante : « Nous devons considérer longuement et froidement la situation dans laquelle nous nous trouvons. Il est inconcevable qu’en raison de la pensée que nous tenons pour la plus sacrée, notre communauté soit source de préoccupations, de danger, de tueries et de destruction pour le monde entier. (…) Il est inconcevable que cette pensée – je ne parle pas de “religion” mais de pensée (i.e. de ce corpus d’idées et de textes que nous avons sacralisés au cours des siècles jusqu’à les rendre intangibles) puisse nous opposer au monde entier. Peut-on imaginer que 1,6 milliard de personnes puissent vouloir tuer le reste des habitants du monde (qui sont 7 milliards) ? C’est impensable ! » Voilà une accusation claire de la violence intrinsèque à la pensée islamique … qui sera cautionnée dès la semaine suivante par l’attentat contre Charlie-Hebdo et les meurtres d’Amedy Coulibaly le lendemain. Notons que le refrain « Pas d’amalgame ! » fut aussitôt repris en chœur, tandis qu’aux Etats-Unis, un célèbre prédicateur musulman commentait ainsi l’attentat : « Contrairement à une conception répandue mais erronée, l’islam ne signifie pas la paix, mais la soumission aux commandements d’Allah seul. Les musulmans ne croient pas au concept de liberté d’expression, parce que leurs paroles et leurs actes sont déterminés par la révélation coranique et non par leurs désirs … Les conséquences potentielles d’une insulte au prophète Mahomet sont connues de tous : L’insulteur doit être tué ! L’honneur du Prophète est une chose que tous les musulmans veulent défendre, jusqu’à faire justice eux-mêmes, ainsi que nous le voyons souvent ». Aussitôt après l’attentat contre Charlie Hebdo Barack Obama a annoncé pour sa part quelle allait être sa « priorité ». On vous le donne en mille… Combattre l’islamophobie !

D’) Il faut noter que le Président Al-Sissi n’a pas rejeté l’islam en tant que tel, mais s’est appuyé sur la distinction entre « la religion » et la « pensée erronée » qui trahirait l’islam. Cependant, quelle est la légitimité de cette distinction, car qui a la pensée non-erronée sur l’islam ? Qui est dépositaire de l’autorité de Mahomet, ou d’Allah pour pouvoir dire ce qu’est l’islam et ce qu’il n’est pas ? Cette absence d’autorité voue le destin de la communauté musulmane à être celui d’un panier de crabes, comme l’ont montré dès sa naissance divisions, guerres intestines, et le meurtre des treize premiers califes … Si le Coran est la source de l’islam, et si nul ne connaît son interprétation sinon Allah, comme lui-même l’enseigne (Coran 3.7), qui peut dire ce qu’est l’islam ?

E) On pourrait peut-être indiquer au registre des tentatives d’évolution de l’islam, la rédaction de la Déclaration des droits de l’homme en islam, adoptée au Caire le 5 août 1990 par l’Organisation de la coopération islamique et ses cinquante-sept États membres.

E’) Mais cette Déclaration semble davantage faite pour affirmer l’islam que pour souscrire à la Déclaration universelle des droits de l’homme promulguée en 1948 par les Nations Unies … puisqu’elle affirme, notamment, l’inégalité ontologique et légale de l’homme et de la femme, s’oppose à la liberté religieuse, limite la liberté d’expression … Ainsi, elle stipule : « Tout homme a le droit d’exprimer librement son opinion pourvu qu’elle ne soit pas en contradiction avec les principes de la charia (art. 22) »Alors que les droits de l’homme sont inhérents à la nature humaine et ne dépendent pas de la foi chrétienne (Antigone, cinq siècles avant Jésus-Christ, les proclamait déjà), en islam, au contraire, la personne n’est sujette de pleins droits que si elle est musulmane … car « l’islam est la nature de l’homme (Coran 30.30) ». Ainsi l’article 10 de cette Déclaration stipule : « L’islam est la religion naturelle de l’être humain ». Ce qui implique qu’être musulman ne relève pas d’un acte de liberté et n’est donc pas véritablement humain, mais encore qu’appartenir ou se convertir à une autre religion est contre nature et doit donc être éliminé. L’islam ne connaît pas la Loi naturelle, participation de la raison humaine à l’éternelle Loi divine, connaissance qui donne de coopérer de façon consciente, libre et responsable, aux desseins merveilleux de la Providence. La seule loi que connaît l’islam est la charia, qui remplace la connaissance du bien et du mal par celle du licite et de l’illicite (halal/haram). Ainsi, cette même Déclaration précise : « Tous les droits et toutes les libertés dont parle ce document sont subordonnés aux dispositions de la charia. (Art. 24) » En conséquence et en contradiction avec l’article 17 de la Déclaration des Droits de l’homme de 1948, elle proclame l’impossibilité de se convertir à une autre religion que l’islam. « La charia islamique est l’unique source de référence pour expliquer ou éclairer chacun des articles de la présente Déclaration (Art. 25) », dont la formule : « à moins que la charia n’en dispose autrement » ponctue la fin de la plupart de ses articles. Lorsque les nations occidentales acceptent sur leurs territoires des dérogations, des dispositions particulières, des aménagements ou même que des tribunaux siègent au nom de la charia, comme c’est notamment le cas en Angleterre, font-elles preuve de tolérance et d’humanisme comme elles veulent s’en convaincre, ou bien consacrent-elles la négation des principes universels des droits de l’homme qu’elles prétendent défendre et promouvoir ? En quel pays musulman la liberté religieuse est-elle respectée ? On lit ceci dans la Constitution du Maroc : « La lutte contre le prosélytisme chrétien conformément à la loi ne peut pas être considérée comme une atteinte aux droits de l’homme, car il s’agit d’une action visant à prévenir les tentatives pour saper les valeurs religieuses immuables du pays. La liberté de croyance ne signifie pas la conversion à une autre religion. »

F) On pourrait mentionner tous les échecs des tentatives de vouloir créer un islam de France. Ainsi, le Haut Conseil à l’intégration (HCI) voulu comme « instance de réflexion et de propositions » a été institué en décembre 1989 (Gvt de Michel Rocard et rattachée aux services du Premier ministre) avec la mission d’émettre des avis consultatifs sur « l’intégration des résidents étrangers ou d’origine étrangère ». Il publia trois rapports entre fin 2010 et fin 2012 : sur “la neutralité en entreprise”, “la laïcité dans la fonction publique” et “la pédagogie de la laïcité à l’école”. L’instance ne survivra pas au document de fin 2012 qui remettait en cause le port du voile à l’université, et préconisait l’adoption d’une loi interdisant « dans les salles de cours, lieux et situations d’enseignement et de recherche des établissements publics d’enseignement supérieur, les signes et tenues manifestant ostensiblement une appartenance religieuse ». Sur la base d’auditions, le document évoque le prosélytisme religieux, une « montée de revendications identitaires et communautaristes », le rejet de la mixité et de certains enseignements. Ce rapport a été très critiqué, notamment par le président de la conférence des présidents d’université, Jean-Loup Salzmann, qui dénonça « un rapport déconnecté des réalités, et teinté d’islamophobie ».

G) La question de l’évolution de l’islam s’est posée avec la venue de Napoléon en Egypte, et l’évidence du retard pris par l’islam dans tous les domaines. Un immense complexe de supériorité depuis lors va tenter d’étouffer le sentiment d’infériorité infligé à l’islam, « la meilleure des communautés (Coran 3.110,139), et donner naissance suie à l’effondrement de l’empire ottoman à la fin du XIXe siècle, au mouvement salafiste dans les années 1920. Il s’agit donc d’une réaction à la domination intellectuelle et politique de l’Europe sur le monde musulman. Il ne s’agit donc pas d’abord d’une recherche de la vérité, du progrès, de la science, mais de la manifestation d’un esprit de jalousie, d’envie, d’orgueil. Les leaders initiaux de ce mouvement, Djemâl ad-Dîn al-Afghâni, et plus particulièrement ses disciples, Mohamed Abduh et Mohammed Rachid Rida, critiquent la stagnation de la pensée islamique et la sécularisation des élites musulmanes, et plaident pour une réinterprétation des textes fondateurs de l’islam. Des penseurs comme Sayyid Qotb ont voulu retrouver la supériorité de l’islam dans sa pureté originelle.
[L’ambitieux futur roi d’Arabie saoudite, Abdelaziz Al Saoud, devenait le leader islamique idéal aux yeux de Rachid Rida dont il se fit l’avocat passionné de la cause, notamment via sa publication Al Manar (Le Phare). Après la mort de Rachid Rida en 1935, Hassan el-Banna devint l’éditeur de Al Manar, et créa le mouvement des frères musulmans en 1928.]
Les divers courants salafistes souhaitent la renaissance de l’islam, un retour à la foi des origines, celle des “salaf salih“. Salafisme provient du mot salaf, prédécesseur ou ancêtre. Pour les sunnites, la proximité temporelle avec Mahomet est gage de pureté de l’islam. Les salafistes voient dans la piété des trois premières générations de musulmans la raison de leurs succès militaires et politiques dont résulte l’expansion de l’islam.
Deux tendances antagonistes : Là où les salafistes de la fin du XIXe siècle plaidaient pour une réinterprétation des textes fondateurs de l’islam selon les principes de rationalité scientifique et de gouvernance libérale, les salafistes contemporains rejettent la rationalité, et préconisent une lecture littérale, non interprétée, des textes, pour faire émerger un islam de vérité en opposition à des mouvements qui auraient dévié.
Selon les époques, le salafisme est soit puritain et littéraliste, soit moderniste et progressif, sans que la disparité entre les deux tendances puisse être rigoureusement expliquée. Du XIIe au XXIe siècle cependant, la constante reste celle de l’impératif d’imitation stricte de Muhammad et de ses compagnons, fixé par Abu al-Hassan al-Achari (874-936) : « Le croyant ne doit rien dire d’autre que ce qu’Allah dit dans le Coran ou que ce que son prophète explique dans la sunna. »

Par salafisme, il faut donc aujourd’hui entendre :

1) L’imitation du Prophète et des trois premières générations de musulmans (orthopraxie),

2) Le rejet de toute idée ou pratique non explicitement autorisée par les Ecritures (orthodoxie),

3) L’exaltation de l’unicité divine : toute association avec Dieu est considérée comme du polythéisme (shirk) => la condamnation des déviances (chiisme, culte des saints…) (tawhid),

4) La vie dans un Etat islamique, pour respecter entièrement la charia, qui nie la séparation du religieux et de l’État, contraire au principe de souveraineté islamique. (shari’a),

5) La séparation des incroyants et des apostats (al-wala’ wal-bara’, le désaveu et la loyauté).

Ces cinq éléments (orthopraxie, orthodoxie, tawhid, shari’a et al-wala’ wa-l-bara’) sont les traits caractéristiques de la théologie salafiste.
Pour les salafistes contemporains, le Coran et la Sunna suffisent et ne révèlent qu’une seule vérité. Il n’y a donc pas de place pour différentes interprétations. La pluralité d’écoles islamiques est inacceptable et l’adhésion à l’une d’elles conduit en enfer. Les salafistes rejettent les consensus des théologiens et le raisonnement par analogie. Spéculer ou raisonner est proscrit, l’idée sous-jacente est que la raison humaine est pervertie par des désirs humains qui ne peuvent que la fausser dans l’interprétation de la vérité divine. Avec un tel jugement négatif porté sur l’intelligence humaine (on pense à ce que disait Luther de la raison !), quelle évolution de l’islam peut être possible, sinon toujours plus d’endurcissement dans les ténèbres de l’ignorance et de l’irrationnalité ?
Plus généralement, les salafistes voient l’Occident comme un ennemi éternel avec ses concepts et valeurs, qui, pour n’avoir pas été utilisés par les pieux ancêtres, sont considérés comme « innovation blâmable » (bid’ah) et doivent donc être rejetés. Pour les salafistes contemporains, le mutazilisme (une école théologique rationaliste fondée au VIIIe siècle) est la quintessence de la déviance, car l’usage de la raison conduirait à remettre en cause l’indivisibilité d’Allah.
Orthopraxie
L’orthopraxie est un élément majeur de l’islam et une pléthore d’hadiths régissent pratiquement tous les aspects de la vie quotidienne, de la posture à adopter pour la prière à l’usage du cure-dent, de l’épilation des aisselles au rasage du pubis, de la taille de la moustache au devoir de se laisser pousser la barbe, du port de vêtements tels que le qamis ou la djellaba à l’hygiène féminine. Les salafistes appliquent littéralement et avec zèle tous ces commandements censés avoir été donnés par le prophète Mahomet. Cela est aussi appliqué dans un but prosélyte et pour stigmatiser le style occidental comme étant une innovation blâmable. Adopter le style vestimentaire ou les manières des juifs ou des chrétiens étaient déjà dénoncé comme contraire à l’islam par Ibn Taymiyya (1263-1328).
Il y a la communauté des vrais croyants et les autres, les corrompus, les mauvais ou non-musulmans, ce qui inclut les chiites. Cette séparation a été mise en valeur par les wahhabites en un principe dit de « loyauté et désaveu » (Al wala’ wal bara’) qui enjoint aux musulmans de haïr les non-musulmans. Ce principe est une pierre angulaire du salafisme. Ce principe (Hijra) important dans l’imaginaire salafiste prescrit aux musulmans de quitter les pays mécréants (kafir) pour émigrer en pays musulman. 
Malgré son rejet de la réflexion et de toute interprétation autre que celle de l’époque de Mahomet, le mouvement salafiste ne peut échapper à des divergences internes, notamment au sujet du djihad, ou de la hisba, le devoir d’ordonner le bien et d’interdire le mal. Alors que le principe al wala wal bara régit les rapports de la communauté avec l’extérieur, la hisba régit les rapports intra-communautaires, ce qui peut aller jusqu’à l’usage de la violence. Tout cela favorise la fragmentation du mouvement, déjà exacerbée par la nature décentralisée de son fonctionnement où chaque savant salafiste offre sa propre lecture comme la seule vérité possible. On distingue néanmoins trois mouvances dans le salafisme contemporain : le salafisme quiétiste, le salafisme politique, le salafisme réformiste, le salafisme djihadiste.

• Le salafisme quiétiste, ou prédicatif, littéraliste, prône la purification de la communauté (oumma) par la pédagogie et l’enseignement religieux ;
• Le salafisme politique, ou réformiste, ou activiste est organisé en mouvements politiques ;
• Le salafisme djihadiste, ou révolutionnaire, prône, lui, l’action armée pour imposer l’islam purifié des origines.

En France, il faut noter les efforts du Qatar pour y exporter le wahhabisme, version extrêmement intolérante de l’islam, ainsi que dans toute l’Europe.
Le salafisme s’impose de plus en plus comme une orthodoxie religieuse, tellement efficace que ses effectifs doublent tous les cinq ans
Internet est devenu le principal pourvoyeur de radicalité. Les salafistes djihadistes y embrigadent la jeunesse et l’incitent à rompre totalement avec le reste de la société dite mécréante.
Parce que le salafisme incarne un « groupe dangereux ou redoutable pour les classes moyennes et supérieures », il fascine ceux qui rejettent sur autrui leurs problèmes personnels.

« La force principale des mauvais c’est la lâcheté et la faiblesse des bons, et tout le nerf du règne de Satan réside dans la mollesse des chrétiens. (S. Pie X, Discours sur la béatification de Jeanne d’Arc, 13.12.1908) » « Nous sommes pour Dieu la bonne odeur du Christ parmi ceux qui sont sauvés et parmi ceux qui se perdent : aux uns, une odeur de mort, qui donne la mort ; aux autres, une odeur de vie, qui donne la vie. – Et qui donc est capable d’un tel ministère ? (2 Co 2.15-16) »
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