Jésus ne cachait pas à ceux qui L’écoutaient la nécessité de la souffrance : « Si quelqu’un veut venir à ma suite, qu’il se charge de sa croix chaque jour, et qu’il Me suive. » (Lc 9, 23). Il en a même fait le test de la fidélité : « Tous ceux qui veulent vivre dans le Christ avec piété seront persécutés. » (2 Tm 3.12 ; Mc 13.13 ; Jn 15.18-21 ; 16.33). Dans la souffrance se cache une force qui rapproche du Christ, parce que le Christ S’est identifié à la souffrance. Celui qui souffre manifeste sa maturité intérieure et sa grandeur spirituelle, leçon pour les personnes en bonne santé, vocation inestimable des handicapés parmi nous.
Si le Christ ressuscité garde en Son corps les traces de Ses blessures, c’est parce qu’elles sont le témoignage irrécusable de Son amour pour nous ! Par Sa Résurrection, Jésus a non seulement montré qu’Il est Dieu, et le vainqueur du Diable, auteur du mal, mais aussi la force victorieuse de la souffrance. A ses frères et sœurs souffrants, Jésus découvre progressivement les horizons du Royaume de Dieu : un monde converti à son Créateur, un monde libéré du péché, et qui se construit par la puissance salvifique de l’amour. La souffrance ne peut pas être transformée par une grâce venant du dehors, mais par une grâce intérieure. Le Christ, de par sa propre souffrance salvifique, se trouve au plus profond de toute souffrance humaine et peut agir de l’intérieur par la puissance de son Esprit de vérité, de son Esprit consolateur (Jn 14.16 ; 15.26 ; 16.7).
C’est avec des dispositions différentes que les hommes abordent leur souffrance, mais tous commencent par demander : « Pourquoi ? ». Chacun adresse cette interrogation à Dieu. Mais quelle chose étonnante de réaliser que Celui auquel nous posons cette question, souffre Lui-même… et qu’Il veut nous répondre du plus profond de Sa propre souffrance, de Sa croix ! Il faut du temps, et même parfois beaucoup de temps, pour que cette réponse commence à être perçue intérieurement, car le Christ ne répond ni directement ni n’explique abstraitement les raisons de la souffrance.
Il répond par un appel, une vocation. Il dit : « Suis-moi ! Viens ! Prends part avec ta souffrance à l’œuvre du salut du monde qui s’accomplit par Ma propre souffrance ! » (2 Tm 2.3) C’est au fur et à mesure que l’homme prend sa croix et s’unit spirituellement à la Croix du Christ que le sens salvifique de la souffrance lui est manifesté. Ce sens salvifique de la souffrance descend du plan où le Christ se situe jusqu’au niveau de l’homme pour devenir en quelque sorte sa réponse personnelle. C’est alors que l’homme trouve dans sa souffrance la paix intérieure et même la joie spirituelle (Col 1, 24 ; Ep 3.13 ; Jc 1.12 ; 1 P 1.6).
« Je trouve ma joie dans les souffrances que j’endure pour vous » disait St Paul (Ibid.). Surmonter le sentiment profondément enraciné de l’inutilité de la souffrance devient une source de joie. Non seulement la souffrance ronge intérieurement la personne, mais elle semble faire d’elle un poids pour autrui. Mais que soit découvert le sens salvifique de la souffrance de par l’union au Christ, et ce sentiment déprimant est transformé ! Celui qui volontairement « complète ce qui manque aux épreuves du Christ » (Col 1.24) découvre qu’il est utile, utile comme le Christ, au salut de ses frères et sœurs. Il accomplit un service irremplaçable ! Dans le Corps du Christ, qui grandit sans cesse depuis la Croix du Rédempteur, grain de blé jeté en terre (Jn 12.24), la souffrance, imprégnée de l’esprit de sacrifice du Christ, devient l’aimant qui attire les bienfaits indispensables au salut du monde ! Nous devenons co-rédempteurs.
Et ce n’est pas tout : le divin Rédempteur veut pénétrer dans l’âme de toute personne qui souffre par l’intermédiaire du cœur douloureux et immaculé de sa très sainte Mère, debout au pied de Sa croix. Comme pour prolonger la maternité dont il a reçu la vie par l’œuvre du Saint-Esprit, le Christ, au moment de mourir, a conféré à Marie toujours vierge une maternité nouvelle (Jn 19.25-27) — spirituelle et universelle — à l’égard de tous les hommes, afin que chacun, dans le cheminement de la foi, Lui reste, avec elle, étroitement uni jusqu’à la Croix, et que toute souffrance, régénérée par la force de cette Croix, de faiblesse de l’homme qu’elle était, devienne puissance de Dieu (1 Co 1.25 ; 2 Co 11.30 ; 12.5-10 ; 13.4) !
Si les gens savaient qu’ils vont Enfer, combien ils aimeraient leur croix !
“Si quelqu’un veut venir à Ma suite, qu’il prenne sa croix chaque jour et qu’il me suive. (Mt 16.24)”
De Ste Thérèse d’Avila, Relations n° 36.
Notre Seigneur me dit un jour : « Penses-tu ma fille, que le mérite consiste à jouir ? Non, mais à agir, à souffrir et à aimer. Tu n’as pas entendu dire que St Paul ait goûté plus d’une fois les joies célestes, tandis qu’il a eu très souvent à souffrir. Regarde aussi ma vie, toute remplie de souffrances ; tu n’y trouves d’autre jouissance que celle du Thabor. Quand tu vois ma Mère me tenant dans ses bras, ne t’imagines pas que ses joies furent exemptes d’un cruel tourment : dès qu’elle eut entendu les paroles de Siméon, mon Père, par une vive lumière, l’éclaira sur ce que J’aurai à souffrir. Ces grands Saints qui passaient leur vie dans le désert pratiquaient sous l’inspiration de Dieu de très rudes pénitences ; en outre, il soutenaient de grands combats contre le démon et contre eux-mêmes, et restaient fort longtemps sans aucune consolation spirituelle. Crois-le, ma fille, ceux-là reçoivent de mon Père de plus grandes souffrances qui sont le plus aimés de Lui, et ces souffrances sont la mesure de Son amour. En quoi puis-je mieux te montrer le Mien, qu’en choisissant pour toi ce que J’ai choisi pour Moi-même ? Regarde ces plaies, tes douleurs n’iront jamais jusque là. C’est là le chemin de la Vérité. Quand tu l’auras compris, tu m’aideras à pleurer la perte des gens du monde, dont tous les désirs, tous les soins, toutes les pensées tendent vers un but opposé. »
Lettre de Ste Rose de Lima (1586 – 1617) au médecin Castillo (Liturgie des Heures, t.3, p. 1259)
Le Seigneur notre Sauveur éleva la voix et dit, avec une incomparable majesté : « Tous doivent savoir qu’après l’épreuve vient la grâce ; tous doivent connaître que, sans le poids des afflictions, on ne peut parvenir au sommet de la grâce ; tous doivent comprendre que la mesure des charismes augmente avec l’accroissement des peines. Les hommes doivent se garder d’errer ou de se tromper. C’est la seule véritable échelle du Paradis, et hors de la Croix on ne trouve pas d’échelle pour monter au Ciel. »
Lorsque j’entendis ces paroles, un élan très fort m’emporta, comme pour me faire venir au milieu de la rue, afin que je dise, avec de grands cris, à tous les gens de tout âge, sexe et condition : « Ecoutez, peuples ; écoutez, tout le monde. Sur l’ordre du Christ, en employant les paroles sorties de Sa bouche, je vous en avertis : nous ne pouvons acquérir la grâce si nous ne souffrons pas d’afflictions ; il faut que les peines s’accumulent les unes sur les autres pour obtenir de participer intimement à la nature divine, à la gloire des fils de Dieu, à la parfaite félicité de l’âme. »
Le même aiguillon me poussait à prêcher la beauté de la grâce divine ; j’en étais prise d’angoisse et cela me faisait transpirer et haleter. Il me semblait que mon âme ne pouvait plus rester enfermée dans la prison du corps, mais qu’elle devait, après avoir rompu ses liens, s’en aller dans le monde entier, avec une agilité sans entrave, parfaite et toujours plus grande, en disant : « Si les mortels pouvaient connaître l’importance de la grâce divine, combien elle est belle, noble et précieuse ; combien de richesses elle recèle, combien de trésors, d’allégresse et de délices ! Sans aucun doute ils s’appliqueraient, de toute leur activité et de tous leurs soins, à se procurer peines et afflictions ! Tous, à travers le monde, rechercheraient, au lieu de richesses, ennuis, maladies et tourments, pour acquérir l’inestimable trésor de la grâce. C’est là le butin et le profit ultime de la patience. Personne ne se plaindrait de la Croix ni des peines qui pourraient advenir, si l’on connaissait la balance où elles sont pesées pour la rétribution des hommes ».
De Maria Valtorta, « Les cahiers de 1944 », Editions du Parvis, 1ère édition, p. 533.
« Je sais, Seigneur, que les jours où Tu me fais le plus pleurer
sont ceux qui m’apportent le plus de profit.
Merci donc de me faire pleurer.
Je sais, Seigneur, que les jours où Tu me fais le plus souffrir
sont ceux où Tu me donnes d’alléger le plus les souffrances des autres.
Merci donc de me faire souffrir.
Je sais, Seigneur, que les jours où Tu me mets le plus au supplice en Te cachant
sont ceux où Tu vas vers l’un de mes pauvres frères qui s’est perdu.
Merci donc de cette agonie.
Je sais, Seigneur, que les jours où Tu laisses passer sur moi la vague amère de la désolation,
qui a déjà le goût du désespoir,
sont ceux où je Te rends à un frère désespéré.
Merci donc de cette vague amère.
Je sais, Seigneur, que les ténèbres qui me rendent aveugle,
que la faim qui m’affaiblit, que la soif qui me fait mourir, pour Toi, de Toi,
servent à Te donner –Toi qui es Lumière, Source et Nourriture- à ceux qui meurent de toutes les morts.
Merci donc de mes ténèbres, de ma faim, de ma soif.
Je sais, Seigneur, que mes morts spirituelles sur Ta croix
sont autant de résurrections à des morts à Ta croix.
Merci donc de me faire mourir.
Car je crois, Seigneur, que tout ce que Tu me fais est pour mon bien, dans un but de bien,
pour la Gloire de Dieu, le Bien suprême ;
car je crois que je retrouverai tout cela
quand le simple fait de Te voir me fera oublier toutes les souffrances endurées ;
car je crois que chaque souffrance fera grandir ma joie ;
car je crois que celle-ci s’ornera des noms de ceux que j’aurais sauvés par ma souffrance ;
car je crois que, pour les « victimes », il n’est pas de justice, mais seulement de l’amour ;
car je crois que notre rencontre ne sera qu’un sourire, un baiser, Ton baiser ;
mon Jésus-Amour, qui essuiera toute trace de larmes.
Parce que je crois tout cela,
je te remercie de mes épines innombrables et je T’aime d’un amour encore plus grand.
Tu ne m’as pas attribué la part de Marie, la meilleure,
mais la Tienne même, la part parfaite : la souffrance.
Merci Jésus. »
MA JOIE, Poésie de Ste Thérèse de l’enfant Jésus de la Sainte Face
Il est des âmes sur la terre
Qui cherchent en vain le bonheur
Mais pour moi, c’est tout le contraire
La joie se trouve dans mon cœur
Cette joie n’est pas éphémère
Je la possède sans retour
Comme une rose printanière
Elle me sourit chaque jour.
Vraiment je suis trop heureuse,
Je fais toujours ma volonté…
Pourrais-je n’être pas joyeuse
et ne pas montrer ma gaieté ?…
Ma joie, c’est d’aimer la souffrance,
Je souris en versant des pleurs
J’accepte avec reconnaissance
Les épines mêlées aux fleurs.
Lorsque le Ciel bleu devient sombre
Et qu’il semble me délaisser,
Ma joie, c’est de rester dans l’ombre
De me cacher, de m’abaisser.
Ma joie, c’est la Volonté Sainte
De Jésus mon unique amour
Ainsi je vis sans nulle crainte
J’aime autant la nuit que le jour.
Ma joie, c’est de rester petite
Aussi quand je tombe en chemin
Je puis me relever bien vite
Et Jésus me prend par la main
Alors le comblant de caresses
Je Lui dis qu’Il est tout pour moi
Et je redouble de tendresses
Lorsqu’Il se dérobe à ma foi.
Si parfois je verse des larmes
Ma joie, c’est de les bien cacher
Oh ! que la souffrance a de charmes !
Quand de fleurs on sait la voiler !
Je veux bien souffrir sans le dire
Pour que Jésus soit consolé
Ma joie, c’est de le voir sourire
Lorsque mon cœur est exilé…
Ma joie, c’est de lutter sans cesse
Afin d’enfanter des élus.
C’est le cœur brûlant de tendresse
De souvent redire à Jésus :
Pour toi, mon Divin petit Frère
Je suis heureuse de souffrir
Ma seule joie sur cette terre
C’est de pouvoir te réjouir.
Longtemps encor je veux bien vivre
Seigneur, si c’est là ton désir
Dans le Ciel je voudrais te suivre
Si cela te faisait plaisir.
L’amour, ce feu de la Patrie
Ne cesse de me consumer
Que me font la mort ou la vie ?
Jésus, ma joie, c’est de t’aimer !
Pourquoi certains souffrent-ils plus que d’autres?
Comment expliquer que certains se font souffrir eux-meme, meme si c’est involontaire?
Sommes-nous tous pareils ?