Je lis sous la plume de mon vénérable confrère, le père Christian Vénard, aumônier militaire de son état, un essai de justification des propos du pape François relatifs à l’islam, qui le stupéfient. Ceux-ci seraient dus à l’adoption de l’attitude prêtée au pape Pie XII durant la seconde guerre mondiale face au nazisme : le silence… Silence justifié par la crainte que de nouvelles condamnations verbales du régime nazi par le Souverain Pontife n’entraînassent de nouvelles persécutions du peuple chrétien. 

Cette tentative de justification est touchante, mais elle est vaine, aussi vrai que ne rien dire n’est pas comparable à dire quelque chose de faux… Or, il est faux de dire qu’il y a quelque chose de commun entre christianisme et islam (Cf. 2 Co 6.14-18 ; Ga 1.8-9), en l’occurrence un même rapport à la violence. Il est des silences réprobateurs, qui tout en permettant de n’en penser pas moins, peuvent être fort éloquents (Cf. Le silence de Jésus durant son procès religieux, Mc 14.61), mais dire quelque chose de faux, ou même de oiseux, est toujours condamnable (Ex 20.16 ; Dt 5.20 ; Pr 14.5 ; Si 28.13 ; Mt 12.36). Nous, chrétiens, disciples de la Parole de Dieu incarnée, de la Vérité en personne, nous devrions nous distinguer dans l’art d’user du langage à la perfection pour rendre témoignage de la Vérité (Jn 18.37). Aussi, les dénégations, les rectifications et les mises au point du Service de communication pontifical qui suivent presque immanquablement les prises de paroles de notre Pape, rendent-elles honneur à Notre Seigneur ? 

Quant au motif d’une recrudescence de violence probable subie par les chrétiens en représailles d’une parole de vérité prononcée au sujet de l’islam, il ne doit pas être systématiquement considéré comme un argument dirimant. En effet, s’il l’était, alors Jésus n’aurait jamais envoyé ses disciples comme des brebis au milieu des loups (Mt 10.16), leur promettant d’être haïs de tous (Mc 13.13), et les invitant en conséquence à prendre chaque jour leur croix (Mt 16.24), car « il n’y a rien de si nécessaire, de si utile et de si doux, ni de si glorieux que de souffrir quelque chose pour Jésus-Christ. (Saint Louis Marie Grignon de Montfort, Lettre aux Amis de la Croix, n°14) ». Si donc chaque jour nous ne sommes pas prêts à souffrir et à mourir pour l’amour de Jésus, nous ne sommes pas chrétiens. Mais si nous le sommes, alors, nous ne considérons pas la Croix comme une étrangeté inopportune ou un malheur à fuir, mais comme le chemin, le seul chemin, qui conduit au Paradis… Comment présenter la persécution comme une malédiction alors que Jésus en a fait une béatitude : « Bienheureux êtes-vous, quand les hommes vous haïront, quand ils vous frapperont d’exclusion et qu’ils insulteront et proscriront votre nom comme infâme, à cause du Fils de l’homme. (Lc 6.22) » ? « Si les mortels pouvaient connaître l’importance de la grâce divine, combien elle est belle, noble et précieuse ; combien de richesses elle recèle, combien de trésors, d’allégresse et de délices ! Sans aucun doute ils s’appliqueraient, de toute leur activité et de tous leurs soins, à se procurer peines et afflictions ! Tous, à travers le monde, rechercheraient, au lieu de richesses, ennuis, maladies et tourments, pour acquérir l’inestimable trésor de la grâce. C’est là le butin et le profit ultime de la patience. Personne ne se plaindrait de la Croix ni des peines qui pourraient advenir, si l’on connaissait la balance où elles sont pesées pour la rétribution des hommes. (Sainte Rose de Lima, Liturgie des Heures, t.3, p.1259) » Il est plus que temps que nous retrouvions la fierté des premiers chrétiens qui ne voulaient « rien connaître sinon Jésus-Christ et Jésus-Christ crucifié (1 Co 2.2) » !

En fait, les vrais musulmans n’ont pas besoin que nous leur donnions de prétextes pour redoubler de haine à l’égard des chrétiens, Allah leur en a donné dans le Coran une source inépuisable et toujours disponible : « Entre nous et vous, c’est l’inimitié et la haine à jamais jusqu’à ce que vous croyez en Allah, seul ! (Coran 60.4) »… Pour un musulman, les chrétiens « ne sont qu’impureté (Coran 9.28), « plus vils que des bêtes (Coran 8.57) », « les pires de la création (Coran 98.6) », en sorte qu’Allah doit les tuer (Coran 9.30), ce qu’il fait lorsque les musulmans le font (Coran 8.17)…

Dire du bien au sujet de l’islam non seulement renie la Révélation chrétienne (Mt 12.30 ; Ga 1.8-9 ; 2 Co 6.14-18), mais encourage les musulmans à rester musulmans, déroute les musulmans convertis au christianisme, et conduit les chrétiens peu formés, objets de la propagande musulmane, à se convertir à l’islam…   

Je crois donc que taire la vérité au sujet de l’islam, et a fortiori le flatter, est non seulement une trahison de la Vérité, Notre seigneur Jésus-Christ, qui n’apportera pas le relâchement de la persécution escompté, mais sert au contraire les intérêts de ce cruel prédateur séculaire de l’Église, et que seul le témoignage rendu à la Vérité nous libérera (Jn 8.32), nous, et les musulmans, de la malédiction de cet Antichrist caractérisé (1 Jn 2.22).

Lorsque le père Vénard dit ne pas comprendre les propos du Pape prononcés lors de son retour des JMJ : « Si je parle de violence islamique, je dois parler de violence catholique », Henri Hude, docteur en philosophie, répond qu’il s’agit d’une erreur de traduction, que la bonne traduction est « violence musulmane », et que cette traduction changerait tout puisque « musulman » ne dirait rien de l’islam, mais désignerait seulement le musulman en tant qu’il est un homme, comme le catholique est un homme, et que tous deux sont pareillement capables d’être violents. Voilà, avec cela, tout le monde devrait être contents : et le musulman parce que rien n’est dit de l’islam, et le chrétien parce qu’il devrait pouvoir se contenter de ce semblant de justice le mettant à égalité avec le musulman…  Eh bien non, même comme cela, cela ne passe pas ! Pourquoi ? Parce que, outre que cette explication ne rend pas compte de la raison pour laquelle la conversation du Saint Père porte sur l’association musulman et violence, la vérité est que lorsqu’un chrétien commet le mal, il ne peut se revendiquer ni de l’exemple ni de l’enseignement de Jésus-Christ, tandis que lorsqu’un musulman fait la même chose, ou pire, il peut toujours se revendiquer et de l’exemple de Mahomet et de l’enseignement d’Allah. C’est cela qu’il faut dire et non pas s’évertuer à cacher ! C’est cela la vérité ! Comment autrement annoncer la bonne nouvelle aux musulmans et vacciner les chrétiens contre l’islam ?! Croyons-nous encore que la vérité  libère (Jn 8.32) ?

Le père Vénard a bien raison de vouloir « défendre le Pape François, l’aimer, prier pour lui et la mission immense qui est la sienne » et de rappeler les paroles que le Christ a adressées à saint Pierre : « Tu es Pierre et sur cette Pierre Je bâtirai mon Église et les portes de l’enfer ne prévaudront pas contre elle (Mt 16.18) », mais il ne faut pas oublier non plus celles qu’Il a prononcées peu après : « Tu M’es un obstacle, tes paroles ne sont pas celle de Dieu, mais celles des hommes »…

Abbé Guy Pagès

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